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Visions funèbres

Les poèmes suivants sont tirés des recueils Les Apparitions et Les Névroses

Les pendants, interprète : Martine Rivière
Le fantôme d'Ursule, interprète : Yvette Pujo
La folie, interprète : Laurence Fosse (musique et chant)
Le fou, interprète : Marie Ordinis
Le rire, interprète : Sarah Sebbag

Je ne sais pas quelle impression vous font en ce soir de juin 2001 ces poèmes un peu morbides. Mais maintenant que vous les avez entendus, c'est le moment pour moi d'évoquer la façon dont Rollinat les interprétait dans les salons, dans les cafés et plus particulièrement au Chat Noir.

André Velter, auteur de l'anthologie parue en 1996 chez Gallimard Les Poètes du Chat Noir, donne dans sa préface, à partir de témoignages de l'époque, une description saisissante de « l'envoûtement qu'y développait Maurice Rollinat lorsqu'il disait ou chantait ses poèmes en s'accompagnant lui-même au piano »*.

« Musicien spontané, improvisateur fabuleux, auteur macabre et satanique, il avait le don de porter le trouble à son paroxysme en aiguisant l'atroce, raffinant l'angoisse”, selon les mots de Léon de Berry qui avouait en avoir gardé une impression inoubliable. Son emprise sur le public était telle que même Léon Bloy acceptait de se joindre à l'enthousiasme général. [...]
À l'aise dans l'excès, superbe dans la transe, amoureux du morbide, expert en tourments, il était sans rival dans le rôle du poète-interprète.
“Incomparable diseur de vers”, écrit Michel Herbert dans un portrait saisissant, Rollinat se transfigurait et devenait sublime lorsque, assis de trois quarts devant le piano, il effleurait le clavier de ses doigts inspirés et chantait cette musique bizarre, heurtée, prenante, composée d'instinct, d'un seul jet, sans souci des lois de l'harmonie, cette musique que, la plupart du temps, sa voix extraordinaire, s'étendant sur cinq octaves, était seule capable de traduire. Il ajoutait à l'étrangeté de ses compositions par des hurlements, des grondements, des cris gutturaux, impossibles à transcrire sur une portée, mais suprêmement évocateurs, comme les trois notes de tête, ponctuées de trémolos, qui donnaient l'impression d'une girouette rouillée tournoyant au gré des tempêtes. »

 

*Image : Maurice Rollinat chantant au piano, d'après une aquarelle de Gaston Béthune (1857-1897).
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