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 Ballade de la robe rouge À Mme B. C.
 Couleur de sang, couleur de cardinal, Couleur de feu, couleur de seigneurie,
 Couleur de lèvre et couleur de fanal,
 Couleur de rêve et couleur de féerie,
 Couleur d'amour : votre Sorcellerie
 N'avait besoin de tant pour me charmer ;
 Mais, sans regret, sans peur, sans fourberie,
 En robe rouge, il faut bien vous aimer.
 La soie éclate ainsi qu'un air royal.
 Dans sa gloire et dans sa forfanterie,
 Et brûle comme un baiser nuptial,
 Et brille comme une joaillerie,
 Lorsqu'un rayon bleu, gente tricherie,
 En l'ombre tiède est venu s'allumer :
 Vaincu, l'on dit tout bas : Je vous en prie...
 En robe rouge, il faut bien vous aimer.
 De l'encensoir, l'encens sacerdotal
 Monte et fume, odorante rêverie :
 Approchons du tabernacle augustal
 Où trône, sous la noble draperie
 Et dans la pourpre et dans l'orfèvrerie
 Le Saint des Saints. Comment ? C'est blasphémer ?
 Mais non, ce n'est rien qu'une allégorie :
 En robe rouge, il faut bien vous aimer.
 ENVOI Princesse, un poète, en sa flânerie, Cisela ce coffret, pour enfermer,
 Sous un triple vantail, le cœur qui crie :
 En robe rouge, il faut bien vous aimer.
 Remy de Gourmont, 14 janvier 1887, Lettres à Sixtine.. |