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"Cailloux"

Le caillou est plus dur que ma tête.
Le caillou est plus dur que mes pieds.
Quand ils me lapidaient,
Les cailloux blessaient ma tête.
Lorsqu’ils me traînaient sur le dur sentier pentu,
Les cailloux écorchaient mes pieds.
C’était un chemin pénible à parcourir...
Les cris, la haine, les crachats,
Les coups sur mon passage.
Mais je me détachais progressivement de tout cela.
Bientôt, j’arriverais au sommet du Calvaire(*).
Une fois là-haut, tout sera terminé...

(*) : Non, ce n’est surtout pas LE CHRIST !
Sinon, le texte serait vidé de son sens et réduit à une imagerie saint-sulpicienne. Ce poème ne délivre aucun message religieux...
Le Calvaire n’a pas de valeur historique ou géographique mais symbolique. Il peut être entre "partout" et "nulle part". C’est le champ de coton du Sud profond où le Ku-Klux-Klan lynche le "nègre" et le cloue vivant sur une croix de flammes dans le ciel nocturne...
C’est "le juif" que l’on sortait brutalement de chez lui, à Berlin, entre 1933 et 1939, pour le lyncher sur le trottoir avant de le pendre à un réverbère.
...Mais c’est aussi "la pute à boches", molestée et tondue à la libération, pour du chocolat, du beurre ou une paire de bas de soie...
Ici, la victime n’a ni nom, ni nationalité, ni visage. Il est le "condamné type", la victime expiatoire livrée à l’hystérie collective de la foule et à une justice expéditive...
Peu importe qu’il soit innocent ou coupable, meurtrier ou simple voleur de pomme.

Ceci est un cri de protestation contre la Haine et l’Intolérance...

Claude Mercutio
          06/2003

© Claude Mercutio
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