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Le Lai de Lanval (extrait)

Ce nouveau Lai, d'une gageure,
Propose conter l'aventure,
D'un bien noble et gentil vassal,
En breton, prénommé Lanval,

Un roi vivait dans une ville,
Arthur le Courtois, de Carlisle.
Il affrontait Scottisch et Pis,
Qui dévastaient tout le pays ;
Ils entraient en terre de Logres,
Pillaient, mangeaient comme des ogres.
De la Pentecôte à l'été,
Là venait ce roi de gaîté.
Il offrait présents et richesses,
À barons, comtes et princesses,
Ceux de la table ronde aussi,
Qui surpassent les gens d'ici.
Répartit ses biens et domaine,
Sauf à l'un, le laissant en peine,
Mais de Lanval ne se souvint,
Et nul autre ne le soutint,
Car tant en bonté qu'en largesses,
Que pour sa beauté, ses prouesses,
Ce noble preux chevalier,
Chacun d'eux pouvait l'envier,
Nul n'eût songé lors à le plaindre
Si l'infortune eût pu l'atteindre.
De haut lignage, fils de roi,
Mais loin des siens, de son arroi,
Servant Arthur parmi sa suite,
Sans argent il vécut en fuite,
Car son Sir rien ne lui donna,
Et Lanval rien ne demanda.
Lors soucieux l'âme peinée,
Il languissait cœur sans Aimée,
Seigneurs n'en soyez point surpris !
Étranger en autre pays,
Est malheureux loin de ses terres,
Sans aide-secours de ses frères.

Cet étranger, comme j'ai dit
Qui Sir Arthur, le roi, servit
Un jour monta sa jument fière,
Et s'en alla vers la clairière,
Par une issue et quelques tours,
Il débouche le long d'un cours, [...] 

Vénus Prin’s
d’après Marie de France (1159-1184)

© Vénus Prin’s
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