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La vache à la porte

Certaine vache se rendait tous les matins
À sa pâture, retrouvant seule le soir,
La porte de sa mangeoire.
Or voici ce qu'il advint :
Un soir qu'elle rentrait des champs
En ruminant paisiblement,
Elle s'immobilisa devant une porte
Qui lui sembla être sa porte,
Mais qu'elle ne reconnut pas :
Quelqu'un, en son absence, l'avait peinte en rouge.
- Car ici-bas le monde bouge
Et rien, jamais, n'est immuable ! -
Perplexe, elle marqua le pas :
« Etait-ce bien là, la porte de son étable ?
Oui, ce l'était ! Non... ce ne l'était pas...
Si... non... peut-être... non... »
L'embarras lui plissait le front
Et la très fugitive lueur de conscience
(Un pâle ersatz de la connaissance),
Qui traversa la masse de son encéphale
Ne parvint pas à dissiper le désarroi
De l'animal, qui restait là,
Figé, près de périr dans le dédale
D'une étique pensée en cavale.
Quel enseignement tirer de cela ?
En voici un je crois :
L'être humain est capable de discernement,
Pas le bovin ! Et cette différence,
Implique une conséquence :
Si quelqu'un repeint subrepticement
La porte de la Vérité,
Et quel qu'en soit ou l'ornement ou la couleur,
Ne perdez pas votre temps à tergiverser :
Ne cédez ni à la peur,
Ni à votre paresse naturelle :
Poussez la porte ! Une vérité cruelle
Vaut mieux qu'un mensonge éhonté :
Et il en va de votre dignité !

Yves Tarantik

© Y. Tarantik
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