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L'holocauste

Je les verrai toujours, derrière un barbelé,
Ces maigres visages, ne sachant plus sourire,
Les mains ensanglantées, au grillage abouchés,
Le regard débordant de ce qu'ils voudraient dire.

Mais leur bouche asséchée a oublié les mots.
Qui pourrait supposer ce qu'on leur fait subir ?
Ils sont martyrisés dans leur cœur et leur peau,
Comme des suppliciés au royaume du pire.

Ils n'ont plus de noms, ils portent des numéros
Tatoués dans la chair pour que le sceau perdure
Et la tête rasée, entassés dans l'enclos,
Ils traînent leur effroi en hardes à rayures.

Pis que des chiens galeux et traités sans respect
Les plus forts vont trimer, travail obligatoire,
Les autres, éliminés sans le moindre regret,
Vont confiants vers la douche au « bienfait purgatoire ».

Les cadavres sortis de ces grands abattoirs
Dépouillés de leurs dents, de tous objets en or,
Seront jetés enfin dans les fours crématoires,
Répandant alentour une âcre odeur de mort.

Il y a des enfants, des vieillards, des femmes
Raflés pour des idées ou le port d'une étoile,
Déportés, dénoncés par un voisin infâme
Dans ces camps de la honte où rien ne se dévoile.

Il en faudra du temps pour accorder pardon
Mais l'oubli ne devra jamais céder passage,
Je reverrai toujours dans mes rêves profonds,
Serrant le barbelé, tous ces maigres visages.

Mikéno

© Mikéno, mai 2011
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