Ta couche est un étang où, comme un cygne blanc,
Ton corps vient se glisser dans l'onde souveraine
Et le drap de satin l'épouse, enveloppant
Ta chaste nudité d'un suaire d'ébène.
Un peu de rêverie erre au coin des paupières
Ce genou replié met mon cœur en émoi ;
Rien qu'à t'humer de loin, inassouvie, j'espère
Un signe de tes cils, un geste de tes doigts.
Dors petit prince dors, que nulle créature
Ne s'en vienne troubler ton doux sommeil d'enfant,
La lionne que je suis en ferait sa pâture,
Dors petit prince dors, mon amour te défend.
Lorsque la Lune fuit, aux rayons du soleil
Enluminant de feu tes boucles innocentes,
Rompant, effrontément, le charme du sommeil,
Tu te réveilleras à l'aube renaissante.
Et le monde assoupi, suspendu à tes lèvres,
S'éveillera, saisi par l'écho de ton chant,
Ni les mots veloutés, ni les paroles mièvres
N'égaleront ton cri perçant le firmament.
Et je te bercerai, lové contre mon corps,
D'où tu contempleras ma face maternelle,
Gavé et enivré de tendres ritournelles
Où je te chanterai : dors, petit prince, dors.
Cypora Herszhorn-Sebagh
© C. Herszhorn-Sebagh