Désert éternel

Le soleil encor haut dans le ciel africain
Brûle les grains de sable en ce jour incertain.
La chaleur donne à l’air des sursauts de volutes
Telle une longue valse aux cent mille culbutes.

La caravane avance aux chemins du désert.
Le pas lourd et puissant, le visage couvert,
Avant un doux répit, chacun des hommes marche
Dans le silence épais de leur lente démarche.

Ils rêvent de fraîcheur dans le calme du soir,
De fugaces amours à l’ombre d’un manoir,
D’une femme lascive allongée sous la treille,
Au regard sensuel, aux superbes merveilles.

Imaginent des mets aux espoirs savoureux,
D’appétissants chapons ou rôtis onctueux,
Du saumon mariné, des liqueurs succulentes
Sous les lustres bleuis des tables odorantes.

Dans le cœur de l’image, au-delà l’horizon
L’astre aux rayons ardents entre dans sa prison,
Leur offre pour un temps, la grande quiétude.
S’ouvre l’obscurité en toute plénitude.

Soudain dans le mystère alourdi de la nuit,
C’est un clapotement, c’est un chant, un doux bruit,
C’est un rêve suave, une tendre romance,
Un murmure de source en une délivrance.

C’est l’oasis enfin, Déesse du repos,
Olympe en son sommeil dans un charmant huit-clos.
S’élèvent les palmiers vers le céleste empire
Où les dieux bienveillants se penchent pour sourire.

En échos indistincts d’un village éloigné,
Se forme une musique au tempo effréné
Qui du berbère a pris la pudique noblesse
Dans l’impalpable paix, authentique maîtresse.

La monture en arrêt, le chapiteau tendu,
Le voyageur savoure un instant attendu.
Il s’étend dans la mer pulpeuse, diaphane
Du Sahara mythique, admirable sultane.

À son tour est le roi dans l’univers sorcier
Avant de retrouver le dieu artificier.
Mais que vive toujours dans un monde torride,
Cet espace éternel en une forme vide.

© Charlotte-Rita Pichon, le 3 avril 2019