Ô Fortuna !

Ô Fortune, déesse à l’humeur vagabonde,
Qui de tout temps régis l’aventure du monde,
Reine capricieuse au visage voilé,
Tu peux nous amener sous un ciel étoilé...

Ou répandre sur nous tes ardeurs meurtrières,
Selon ton bon vouloir et malgré nos prières,
Toi qui tiens dans tes mains l’avenir insidieux,
Tu brouilles de ton jeu la volonté des dieux.

Si les causes sans fin coupent à ton emprise,
Sur leur combinaison tu gardes la maîtrise,
Produisant un effet qui bien ou mal échoit.
Fortune tu souris mais trop souvent déçois.

Figure du hasard, tu réduis le mystère
À ton propre caprice, à un tri arbitraire.
Naître dans une tour à l’or outrecuidant
Ou dans un bidonville est donc un accident.

Aléa malheureux, aubaine inespérée,
Fortune tour à tour maudite et vénérée,
Les mythes ancestraux ont perdu leur éclat,
Les anciens dieux sont morts mais toi tu restes là.

© Nadine de Vos, septembre 2018

Illustration : complainte en latin du XIIIe siècle, « Carmina Burana » est le titre donné au manuscrit que Carl Orff a partiellement mis en musique. Ô Fortuna en est une des stances.