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Renouveau

Le sac au dos, la canne en main,
Aspirant à pleine poitrine,
Dans le sentier, sur le chemin,
Et le lilas et l'aubépine,

Je marcherai, en m'arrêtant
Que pour tremper ma lèvre avide
Dans le frais d'un petit vin blanc,
Doré comme un soleil liquide.

Quand le crépuscule brumeux
Sur la terre étendra son voile,
J'aurai le gazon moelleux
Pour dormir à la belle étoile ;

Et le lendemain je verrai,
Quand s'éveilleront mes pensées,
Paraître en un rayon doré
L'aurore, humide des rosées.

J'aurai l'auberge du chemin,
Qui se cache sous le feuillée,
Dont l'enseigne, au vent du matin,
Grince sur la tringle rouillée...

J'aurai le pain bis, le vin bleu,
J'aurai la soupe appétissante...
J'espère bien avoir un peu
Des gros baisers de la servante !...

Sous les bosquets de cabaret
Ma muse renaîtra plus belle,
En trempant dans le vin clairet
La pointe rose de son aile...

Courons les prés, courons les champs.
Dès aujourd'hui mon âme est veuve ;
Je veux pour fêter le printemps
À ma lyre une corde neuve !

Les Hommes d'aujourd'hui, n° 51, 1879.

Alexis Bouvier (1836-1892) fut ciseleur en bronze de quatorze à vingt-sept ans puis produisit un nombre impressionnant de romans, dont il tira quelques pièces de théâtre.

De nombreux romans de Bouvier sont disponibles sur le site « Gallica » de la BNF.

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